L'aventure PORTAL

De crossman à BP, puis à BPS avant de …
Les frères Denis et Gilles Portal sont deux très bons crossmen français des années 60 et 70. En 1970, Denis, le cadet, est champion de France 500 Inter et Gilles en 500 National.
Connus pour être d'excellents préparateurs et metteurs au point, ils rencontrent à cette époque Jacques Boudet avec qui ils créent une marque de moto française, la BP (Boudet-Portal)
en 1972, qui devient BPS (Boudet-Portal-Seurat) en 1973 avec l'arrivée de Marcel Seurat.
Au salon 1974, Jacques Boudet décide de s'associer avec la marque italienne SWM et de privilégier la vente de motos rebadgées.
Insatisfaits par cette décision qui ne leur permet plus de développer leurs idées, les frères Portal quittent l'entreprise pour créer leur propre marque.
L'aventure Portal commence ainsi suite à un désaccord entre les fondateurs et financier de BPS, Jacques Boudet, et Denis et Gilles Portal, les techniciens.
Ils s'installent à Reyniès, dans le Tarn-et-Garonne, dans un hangar de 600 m2 et vont réussir pendant 10 ans à jouer dans la cour des grands en produisant des machines "à la carte" parmi
les meilleures du marché. Leur aventure démarre en 1975 en proposant une gamme de motos de cross et d'enduro particulièrement performantes.
Les origines de l'enduro en France !!
L'enduro a ses origines dès le début du XXe siècle et prend son essor en 1913 avec la création des International Six Days Trail (ISDT) en Angleterre. Les premières compétitions ont pour
but de mettre à l'épreuve les motos et de montrer leur solidité. Sport très prisé par des nations comme l'Angleterre, l'Allemagne ou l'Italie, et après la Seconde Guerre mondiale par les
nations du bloc de l'est, il faut attendre le début des années 70 et l'avènement de la société des loisirs pour que l'enduro se développe en France. Cela commence par une première
compétition organisée à Brioude en 1972, suivi d'un trophée de France en 1973. C'est à cette époque que les frères Denis et Gilles Portal, deux très bon crossmen des années 60, créent
leur marque de moto spécialisée dans le cross et l'enduro.
Une des meilleures gammes cross et enduro du moment !!
Les premières motos Portal sont présentées en mars 1975.
La gamme cross se limite à une 125 équipée du moteur Sachs 6V.
La gamme enduro comprend une 125 et une 175 cm3 équipées, elles aussi, de moteurs Sachs 6V. Elles ne diffèrent que très peu du modèle cross. L'allure générale est classique, mais la fabrication est soignée avec en particulier un superbe cadre double berceau en acier nickelé avec les meilleurs équipements du moment et des accessoires de qualité : fourche Marzocchi, amortisseurs De Carbon et freins à tambour Griméca. Elles vont vite s'imposer parmi les meilleurs dans les années 70.
C'est en 1976 que le cadre caractéristique de Portal apparaît. Il s'agit d'un treillis tubulaire qui se distingue par ses tubes rectilignes reliant la colonne de direction à un point proche de l'axe du bras oscillant.
Les gammes cross et enduro sont constituées d'une 125 à moteur Sachs V7 monté en porte à faux, et d’une 250 et une 400 à moteur CZ avec l’ajout d’un tirant boulonné entre l’avant du moteur et la colonne de direction. Les modèles à moteur CZ seront produits à très peu d'exemplaires.
En 1977, un tirant boulonné reliant les supports moteurs avant au tube de direction est ajouté pour améliorer la rigidité l’ensemble sur toute la gamme.
Les motos sont maintenant équipées de moteurs Rotax en 125 et 250.
La gamme cross prend le nom de Master et celle d’enduro de Ranger.
Christian Bourden devient champion de France 250 National en enduro, offrant un premier titre à Portal.
En 1978, la gamme s'enrichit d'une 370 cm3 Master.
En 1979, le cadre fait maintenant appelle à une boucle fermée sous le moteur. Un 380 apparaît au catalogue.
En 1980, la cylindrée augmente encore avec un 420, le réservoir Jumbo fait son apparition, la fourche Marzocchi est remplacée par une Bétor.
En 1982, le refroidissement liquide apparaît sur la 125, ainsi que la suspension arrière mono-amortisseur. Des différences plus marquées apparaissent entre les modèles cross et enduro avec l’apparition de la suspension arrière mono-amortisseur et du refroidissement liquide sur les premières.
Le gros modèle en version enduro ne cube que 400 cm3 alors que le modèle cross monte à 480 cm3.
En 1983, la 250 passe aussi au refroidissement liquide et le refroidissement liquide et le mono-amortisseur arrivent enfin sur la gamme enduro. Mis en redressement judiciaire courant 1983, Portal est repris par la société SECMA.
En 1984, toute la gamme passe au cadre double berceau tubulaire perdant ainsi toute son identité. La gamme 1984 s’étoffe avec un 50 trial à variateur, un 80, un 125 et un 250 en version cross et enduro. Très peu d’exemplaires seront produits. Ce sera la dernière année de production pour Portal.
Portal, spécialisé dans le cross et l'enduro mais pas que !
Avec une incursion dans le monde de la vitesse …
En 1977, sous l'impulsion de Charles Claudel, déjà vainqueur de deux courses en critérium 250 avec une Gauthier, que Portal construit un cadre treillis tubulaire adapté à la piste sur le modèle des cadres des machines de cross et d’enduro. Moto minimaliste et sans compromis, la 250 RS est plus une moto de compétition homologuée qu'une moto de route coursifiée. Les accessoires sont les meilleurs sur le marché à cette époque : fourche Marzocchi, amortisseur de direction, amortisseurs arrière De Carbon à gaz et frein à disque Brembo. Le moteur est le Rotax à distributeur rotatif équipant déjà la gamme cross et enduro, dans une version modifiée. Il développe 42 ch à 7500 tr/min, permettant à la moto d'atteindre les 175 km/h. La boîte de vitesses est dotée d'un étagement adapté à la piste avec une première longue.
Véritable moto de course, le confort n'est pas son fort :
commandes reculées, guidons bracelets, selle à dosseret sans rembourrage. Rajoutez-y des vibrations omniprésentes dans le guidon et les repose-pieds et un bruit à peine étouffé qui ne la prédestine pas à une utilisation quotidienne ou au tourisme. Sur circuit, la compacité, la légèreté, la garde au sol importante, le freinage puissant et la vivacité du moteur font merveille. La tenue de route en ligne droite est irréprochable et seuls quelques louvoiements apparaissent dans les grandes courbes prises à fond. Belle avec son cadre violet et ses plastiques jaunes, elle est aussi efficace : première sortie, première victoire, elle remporte les 6 Heures d'Endurance au Mans en 1977.
Une championne au-dessus du lot …
Portal, en proposant la 250 RS, est en concurrence avec la 250 Sport Gauthier, un autre constructeur de motos françaises, qui propose depuis 1976 une 250 à moteur Sachs et Ossa avec le modèle SPQ développé en France par l'association Seurat-Piron-Queirel en 1972. Ces motos légères, performantes et disposant d'un cadre rigide développé pour la compétition, sont des adversaires redoutables sur les circuits français jusqu'à l'arrivée au début des années 80 des premières motos japonaises tenant la route. La Portal 250 RS sera commercialisée jusqu'en 1982 et remportera 3 titres nationaux en Promosport et en Championnat de la Montagne en 1978, 79 et 81 avec François Costes, Dominique Coudière et Philippe Serre, et deux titres en Promosport vitesse en 1979 avec Yves Lungo et en 1981 avec Robert Romas.
L'Aventure Peugeot et la chute …
En 1981, Portal passe un accord avec Peugeot pour développer un programme de compétition et fabriquer le Peugeot 80 TXP. Ce qui, sur le papier, semble être une bouffée d'oxygène pour un petit artisan commençant à ressentir le tassement des ventes des années 80, va vite tourner au cauchemar et précipiter sa chute. Malgré le succès de la version usine qui finira par être équipée d'un moteur modifié de Yamaha YZ à refroidissement liquide, la version de série équipée d'un moteur Peugeot obsolète sera un échec. Peugeot finira par dénoncer le contrat en 1983 et les investissements consentis par Portal dans le cadre de cet accord lui seront fatals.
Suite à l'échec de l'aventure Peugeot, un 80 à moteur Minarelli et à cadre double berceau est ajouté à la gamme en 1984. Portal repris par la société SECMA et toute la production passe au cadre double berceau tubulaire, perdant ainsi son identité. La gamme enduro se compose alors d'un 50 trail et d’un 80 à moteur Minarelli et de 125 et 250 à moteur Rotax. La gamme cross propose un 80 à moteur Minarelli et de 125 et 250 à moteur Rotax.
Le rideau de fin s'abaisse sur Portal dans le courant de l'année 1984. La marque sise à Reyniès, une quinzaine de kilomètres de Montauban aura produit moins de 2000 motos (dont 600 en 1977-78, 400 en 79, 300 en 80, 200 en 81, 150 en 82).
Gloire et chute …
Pour donner une idée de la taille de l'entreprise, le pic de production est atteint en 1978 avec environ 600 machines produites, tous modèles confondus, et une douzaine de personnes travaillent dans l'entreprise en comptant les frères Portal. Sur le plan sportif, 1978 est aussi l'année ou Portal intensifie son engagement en cross. Les succès s'enchaînent en 125 Inter avec Jean-Luc Fouchet et en 500 Inter avec Michel Combes jusqu'à la consécration avec le titre de champion de France de Jean-Michel Baron en 250 inter en 1980. Malheureusement, le début des années 80 voit l'arrivée en force des marques japonaises sur le marché du cross et les petits constructeurs vont disparaitre les uns après les autres. La chute de Portal sera amplifiée par sa malencontreuse association avec Peugeot en 1981 pour le développement d'un modèle enduro, la Peugeot-Portal 80 TXP. Peugeot finira par dénoncer le contrat en 1983 et les investissements consentis par Portal dans le cadre de cet accord lui seront fatals.
Source : www.moto-collection.org et documents personnels
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